berangere: (métal)
2016-02-16 11:03 am

En Bref – Un requin gravé sur une dague en bronze du Yayoi Moyen

shark incision on bronze dagger  La préfecture de Tottori et le Nabunken (Institut de Recherche Archéologique de Nara) ont annoncé la découverte d'un requin incisé sur une dague en bronze du Yayoi Moyen.
  La dague appartient à un lot d'antiquités donné au musée préfectoral de Tottori par la famille d'un collectionneur privé à sa mort il y a vingt-six (26) ans. Elle était dans une caisse étiquetée "Préfecture de Tottori, un temple". Super précis, merci. Gens, ne ramassez pas de matériel archéologique si vous n'êtes pas capables de l'étiqueter correctement. Gens, ne ramassez pas de matériel archéologique.

   C'est la première découverte sur une dague en bronze mais on connaît douze (12) gravures de requins du Yayoi dans la région, sur de la vaisselle en céramique, du mobilier en bois ou en pierre, notamment à Aoyakamijichi (Tottori, neuf exemples sur les douze), Hakaza (Hyōgo) ou Shiroedakōjin (Shimane). [L'article parle d'un culte local du requin, c'est rituel, blabla]
   La dague mesure 42 centimètres et la gravure se situe juste au dessus de l'emplacement pour attacher la poignée. La dague elle-même a été fabriquée vers le milieu du Yayoi Moyen (IIè siècle avant) alors que la gravure a été ajoutée durant la seconde moitié du Yayoi Moyen (Ier siècle avant – Ier siècle après) avec un instrument en fer (Ne me demandez pas comment on date une gravure, ils sont super forts au Nabunken) (Si ils ont juste daté par analogie avec les dessins de requins sur le mobilier de Aoyakamijichi, je suis déçue).
  Le requin mesure 2,3 centimètres (un monstre impressionnant donc) et présente deux (2) ailerons dorsaux, ce qui semble être caractéristiques des requins (la plupart des requins que je rencontre sont des vertèbres ou des dents, donc je ne saurais pas dire).  
  Apparemment, les spécialistes pensent qu'il s'agit d'un requin marteau, comme à Aoyakamijichi. Fortement dubitative, j'ai fait des recherches, ça pourrait être Sphyrna lewini, Sphyrna mokarran ou Sphyrna zygaena, vu de profil, en train de plonger. Mais quand on décide de dessiner un requin avec une tête aussi rigolote vue de dessus, pourquoi le dessiner de profil ? Tabou religieux, probablement. C'est rituel, blabla.
   Je me demande si on a des dessins de requins sur quoi que ce soit à Okinawa. Et s'ils sont de profil.
Carte et mobilier the Aoya kamijichi pour comparaison )

The same, in English )

berangere: (toro)
2015-07-14 10:43 am

En Bref – Projet de fouille extensive du site de Funaki

Location Map of Funaki Site  Alors que certaines municipalités veulent raser des kofuns, d'autres décident de la fouille extensive de 40 hectares de terrain, pour l'amour de la science. Nan, vraiment, y'a même pas de projet d'urbanisme ou d'aménagement du territoire derrière, c'est juste pour la gloire.
   Le site de Funaki (舟木遺跡, Funaki, ville d'Awaji, préfecture de Hyōgo) sur l'île d'Awaji est connu depuis plus de vingt (20) ans. Il s'étend sur plus de 40 hectares, dont 0.4 ont été fouillés sur quatre ans de 1990 à 1993. Plus de deux cent (200) sites du Yayoi Récent sont recensés sur les collines du nord de l'île d'Awaji et la taille de Funaki laisse penser qu'il s'agissait de l'habitat central de cette communauté. Les fouilles des années 1990 ont mis au jour des habitations semi-enterrées, dont certaines de très grande taille, et une quantité impressionnante de vaisselles en céramique, dont des pots probablement utilisés dans la production de sel.

  Awaji, île de 600 km² (pour comparaison l'île d'Oléron fait 174 km²) est un important centre culturel du Yayoi Moyen et Récent. Une grande quantité de mobilier en bronze du Yayoi Moyen (Ier s. avant / IIIè s. après) a été retrouvée dans les sites de la moitié méridionale de l'île, dont récemment sept (7) dōtakus (cloches en bronze) dans la ville de Minami-Awaji (voir par exemple ici)
   De manière assez intéressante, on n'a pas du tout de mobilier en bronze pour le Yayoi Récent (sur Awaji, hein), mais qui a besoin de mobilier en bronze quand on possède le plus grand centre de travail du fer du Japon ? Le site de Gossakaito, qui a enfin réussi a être classé Site d'Importance Historique National, est situé à environ 6 km au sud-ouest de Funaki.
  
  C'est dans ce contexte que la municipalité d'Awaji a décidé d'entreprendre une fouille extensive du site de Funaki car "il est probablement d'une très grande importance pour comprendre le passage du bronze au fer pendant la Civilisation Yayoi et il sera intéressant de voir en quoi on peut le relier aux mythes fondateurs du pays *tousse* le Royaume du Yamatai *tousse*". Le projet débutera cet automne avec tout d'abord une prospection au sol sur les 40 hectares du site pour établir une carte de répartition des vestiges, suivie d'une fouille extensive l'année prochaine. Les articles ne précisent pas comment ils envisagent de fouiller 40 hectares sur une année. Les résultats de la fouille permettront d'établir une comparaison de la structure des habitats et du mobilier entre Funaki et Gossakaito (sans parler de la trouzaine de sites plus petits).
  Un symposium de présentation du projet "Du bronze au fer – À la recherche d'Awaji à la veille de l'apparition du Yamatai" se tiendra à Awaji le 23 Août.
  Ce n'est pas la première fois que la ville d'Awaji se distingue par ses initiatives concernant l'archéologie. Je pense qu'un "Prix de la Ville avec une Attitude Archéologiquement Parfaite" devrait être créé et lui être décerné.

Photo Bonus )

In English )

Source: http://www.sankei.com/region/news/150710/rgn1507100014-n1.html


berangere: (Default)
2015-07-09 01:11 pm

En Bref - Mobilisation pour la préservation d'une résidence princière

  Yashima Kunio, président du Comité de Préservation des Propriétés Culturelles de l'Association des Archéologues du Japon, est venu visiter le site de Nakagusuku Udun, situé dans l'enceinte du lycée de Shuri à Naha. Le site a été fouillé sous le terrain de sport du lycée car la ville de Naha désire construire un nouveau lycée à l'emplacement du terrain de sports, et déplacer le terrain de sport à l'endroit du lycée actuel.
   La campagne de fouilles a duré deux ans, j'y ai pris part pendant trois mois, en charge d'un secteur dans le nord du site. Nous savions d'après les sources historiques que Nakagusuku Udun, la résidence des dauphins du Royaume de Ryūkyū avait un jour existé à cet emplacement*, la surprise a essentiellement résidé dans l'excellent état de conservation. Du coup l'Association des Archéologues d'Okinawa pèse de tout son poids pour obtenir un arrêt des travaux prévus.
   Yashima Kunio est venu lui aussi dans ce but. Après sa visite du site, il a eu une réunion avec le Comité d'Éducation de la Préfecture d'Okinawa et a rédigé une lettre officielle pour demander la préservation de Nakagusuku Udun, envoyée à la préfecture et à la ville de Naha.
Le Comité d' Éducation a déjà annoncé que le projet avait été modifié et que la résidence allait être ré-enterrée, et le nouveau lycée construit au-dessus sans aucun impact sur le sous-sol.
   Cependant, situé si près du château de Shuri, le site de Nakagusuku Udun devrait pouvoir recevoir l'opportunité d'être inclus dans le parc construit autour du centre historique du Royaume de Ryūkyū. Il semble qu'il existe un précédent dans la préfecture d'Ōita où une école a été déplacée pour préserver un site archéologique.


* il existe deux Nakagusuku Udun: d'abord construit à l'est du château de Shuri (emplacement dont cet article parle), il a été déplacé au XIXè siècle au nord. Le Nakagusuku Udun du nord a lui aussi été fouillé, il était sous l'ancien musée préfectoral qui a été déplacé en centre ville. Un projet de reconstruction et d'inclusion de ce Nakagusuku Udun dans le Parc Historique de Shuri est en cours de réalisation.

In English... )

Source : Ryukyu Shinpo
berangere: (anthropo fun)
2015-07-09 09:48 am

Détruire les kofuns c'est mal. Et je ne vous parle pas des malédictions.

  La ville de Numazu a annoncé en mai dernier (je devais hiberner, probablement) son intention de raser le kofun de Takaosan, l'un des plus anciens kofuns de l'est du Japon, pour construire une nouvelle route. Devant le tollé général, la municipalité a depuis mis de l'eau dans son vin, mais l'issue du débat reste à ce jour incertaine.
   L'argument principal étant "de toutes manières, personne n'est au courant de son existence", voici une présentation du kofun de Takaosan en français (et anglais) pour donner à la campagne "Ne rasez pas les kofuns, bande de politiques incultes*" menée en ce moment par divers groupes d'archéologues et de citoyens une dimension internationale.

La suite par ici )



And in English... )
berangere: (Default)
2015-07-07 09:15 am

En bref - Un four polynésien, c'est bien, trente-cinq fours polynésiens, c'est mieux (probablement)

Carte du Japon avec Okinawa et le site de Awayonagawabaru  Le site de Awayonagawabaru (安和与那川原遺跡), Préfecture d'Okinawa, Ville de Nago, Aza Awa) a été découvert en 2007 à l'occasion d'une reconnaissance menée avant la mise en place de mesures pour limiter les dépôts alluviaux de la rivière Yona-gawa. Il est situé en face de l'amas coquillier d'Awa (安和貝塚), sur l'autre rive, mais les deux sites appartiennent à des époques différentes. Le site s'étend sur 1840 m² et est fouillé depuis juin 2014. En janvier de cette année, une zone d'environ 500 m² avait été fouillée, dans laquelle trente-cinq (35) fours polynésiens avaient été trouvés. Il s'agit du plus grand nombre de fours polynésiens trouvés dans un seul site sur l'île d'Okinawa (comme il est précisé "l'île", je suppose l'existence d'un site avec un plus grand nombre de fours polynésiens dans la "préfecture", mais je ne l'ai pas encore trouvé). Ces structures sont circulaires, composées de groupement de pierres brûlées, de cendres et de charbon et sont donc interprétées comme des fours polynésiens (principe du four polynésien : on creuse un trou, on le pave de pierre, on dépose la nourriture –emmaillotée dans des feuilles–, on recouvre de feuilles, branches, combustibles, on met le feu et on attend).

   Le mobilier inclut de la céramique des types Iha, Ogidō et Katoku I, tous correspondant au Kaizuka Ancien (2000-1000 BC)*. Le site a également livré des pierres à moudre, des coquillages, des os de poissons et de dugong, mais aucune habitation pour le moment. À l'époque, le niveau de la mer étant plus élevé, le site se situait probablement à l'embouchure de la rivière Yona-gawa, fournissant un accès à la fois aux ressources marines et fluviales. L'absence d'habitation laisse penser qu'il était utilisé comme base de pêche par les habitants d'un habitat à proximité, et que les repas étaient préparés sur place dans les fours polynésiens.

   Les fouilles se poursuivront jusqu'en février prochain et la publication du rapport de fouilles est prévue pour 2016. Je l'attends.

* Kaizuka Ancien : période parallèle au Jōmon Récent.

Photos )


English )
berangere: (Default)
2015-07-06 01:52 pm

A la recherche de l'armada perdue - Epaves de l'invasion mongole de 1281

Carte du Japon - Emplacement de l'le de Takashima  Le Professeur Ikeda Yoshifumi de l'Université des Ryūkyūs est un pionnier de l'archéologie sous-marine au Japon et le pilier des recherches menées avec le Comité d'Éducation de la ville de Matsu'ura au large de la préfecture de Nagasaki pour identifier les traces de la flotte de l'invasion mongole coulée par un typhon en 1281. Il est à l'origine de la découverte d'un premier bateau mongol (en fait chinois, mais qui faisait partie de la flotte mongole qui de toutes manières était principalement composée de navires coréens. C'est pas comme si y'avait la mer en Mongolie, aussi) en 2011 et avait annoncé en septembre dernier l'identification d'une deuxième épave (avec conférence au Musée Prefectoral d'Okinawa qui faisait à ce moment là une expo sur l'archéologie sous-marine, le hasard fait bien les choses).

 

 

 

 

 

berangere: (itazuke)
2013-10-21 02:01 pm

Les tessons de Funakoshibaru

Carte g�n�rale de l'archipel d'Okinawa montrant l'emplacement du site de Funakoshibaru 

  Écrire des articles et ne pas les publier pendant deux semaines ne va pas aider l'archéologie d'Okinawa à sortir de l'ombre…

 

  L'archéologie d'Okinawa existe, mais c'est une archéologie furtive, en fait. Prenez le site de Funakoshibaru par exemple. Selon des personnes plutôt bien informées (le Centre Archéologique Préfectoral d'Okinawa), il s'agit d'un site important de la préhistoire d'Okinawa. Pour une raison obscure, les pages web qui lui sont dédiées se comptent sur les doigts… d'un doigt. Il est bien mentionné deux ou trois fois en passant sur d'autres sites, mais essentiellement en tant que destination touristique…

De l'archéologie furtive, donc. Heureusement que le Centre Archéologique Préfectoral d'Okinawa fait des conférences.

 

Le site de Funakoshibaru (船越原遺跡, Village de Tokashiki, Île de Tokashiki, Archipel de Kerama, Préfecture d'Okinawa) a été découvert en 1975 à l'emplacement d'une carrière de sable. L'île de Tokashiki compte d'autres sites importants pour la préhistoire d'Okinawa, comme Aharen'ura qui est le site éponyme de la céramique Aharen'ura, datée du début de la Période Kaizuka Récent1. Le Centre Archéologique Préfectoral d'Okinawa mène actuellement un projet quinquennal de prospection archéologique sur les îles Kerama dans le but de recenser tous les sites de la préfecture. En 2012, dans le cadre de ce projet, ils ont conduit une étude sur la distribution des tombes antiques (Période Moderne et début de la Contemporaine) dans le village de Zamami (Île de Zamami), qui a été expédiée en environ trois (3) minutes au début de la présentation et une autre pour déterminer les limites du site de Funakoshibaru.

 

 

 

 

 

-->

 

berangere: (rizière)
2013-09-28 02:31 pm

Relations internationales, cuisine commune et stratigraphie complexe : Kiyuna agaribaru nu bataki

En raison de son incroyable popularité, notre série "La préhistoire d'Okinawa n'est pas un mythe" devient hebdomadaire ! Quoi qu'en pensent les sceptiques, les preuves de son existence s'accumulent et des gens font même des conférences sur sites pour répandre la bonne nouvelle.

 
carte de localisation du site  Le site de Kiyūna agaribaru nu bataki (喜友名東原ヌバタキ, Kiyūna, ville de Ginowan, préfecture d'Okinawa) a fait l'objet d'une cinquième campagne de fouilles par le Comité d'Éducation de la ville de Ginowan cet été, de juin à début septembre, avant la construction d'un immeuble d'habitations. Il s'agit d'un site d'habitat daté des alentours de 500 BCE, à la toute fin de la Période des Amas Coquilliers Moyen (ce qui correspond en gros au Jōmon Final, mais comme la préhistoire d'Okinawa existe avec plusieurs centaines de kilomètres d'eau entre elle et la civilisation Jōmon, elle a le droit d'avoir sa propre terminologie). Les précédentes campagnes ont permis d'identifier vingt-et-une (21) habitations, des foyers extérieurs et des silos / fosses. Le mobilier comporte des vaisselles locales (de type Kayauchibanta et Uzahama), des vaisselles importées de Kyūshū du Yayoi Initial (datées de 2670 BP), des outils lithiques, des coquillages percés et des écofacts (des graines).

Le site est donc particulièrement intéressant parce que 1- il s'agit d'un site archéologique, tous les sites archéologiques sont intéressants ; 2- il permet d'obtenir des indices sur les relations entre Okinawa et le Japon ; 3- ces informations concernent une période de transition entre deux (2) civilisations sur l'archipel japonais, et les transitions sont toujours des périodes amusantes.

 

Cette année, la campagne de fouilles a permis de mettre au jour six (6) habitations, une dizaine de foyers-fosses et des zones de passage (des chemins entre les habitations).

Comme la plupart du temps pour la civilisation Jōmon et la civilisation des Amas Coquilliers, les habitations sont semi-enterrées, creusées dans le sol géologique. Le site est situé dans un endroit ou le sol géologique n'est pas particulièrement épais et dans plusieurs habitations, le creusement atteint la roche mère. Dans cette partie d'Okinawa, la roche mère est du calcaire des Ryūkyū, qui présente une surface très irrégulière. Dans les habitations où cet horizon a été atteint, la roche a été aplanie, probablement par percussions répétées avec d'autres blocs de roche, ce qui a dû représenter un travail conséquent. Après cette préparation, une couche de terre a été déposée sur la surface aplanie. Ce type de sol d'habitation avec dépôt volontaire d'une couche de terre est une hariyuka.

 

 

 

 

 

 

berangere: (Default)
2013-09-23 09:11 am

Quatorze foyers du Jomon Récent sur l'île d'Ie : un indice de sédentarité ?


carte gnrale  Ce prétendu site d'actualités est en passe de devenir semestriel… Pour pallier ce dysfonctionnement flagrant, et dans le cadre de notre nouvelle série "L'archéologie d'Okinawa existe, parlez-en à vos amis (ce n'est pas sale)", j'aimerais attirer votre attention sur l'amas coquillier de Nagarabaru daisan.

   Nagarabaru daisan (ナガラ原第三, littéralement "Nagarabaru III") est un amas coquillier situé sur la côte sud de l'île d'Ie (Kawahira, Village de Ie, Préfecture d'Okinawa), environ à deux kilomètres du port d'Ie, dans une zone qui va prochainement être réaménagée pour contrer la pollution maritime due à l'érosion des terres agricoles.

Une récente campagne de fouilles par le Comité d'Éducation d'Ie, débutée en juillet et qui a duré jusqu'à la fin du mois dernier, a permis de dégager quatorze (14) foyers du Jōmon Récent qui ont été utilisés successivement sur une période d'environ mille (1000) ans (2000 – 1000 BCE), associés à une structure en creux avec pavement de pierres qui est interprétée comme une habitation semi-enterrée.

La zone de fouilles mesure 13 par 36 mètres et les vestiges jōmons ont été mis au jour à une profondeur variant entre 2 et 3 mètres en dessous du sol actuel.

Les foyers, situés autour de l'habitation et dans la zone orientale, présentent des aménagements de pierres pour maintenir les pots à cuire. Le village d'Ie compte d'autres sites qui ont livré des habitations semi-enterrées, mais il s'agit de la première fois que l'on trouve un site présentant autant de vestiges d'une activité domestique dans la préfecture pour cette période. Nagarabaru daisan était probablement un habitat permanent, ce qui  argue en faveur de la sédentarité des populations (la question de la sédentarité des populations jōmons sur Okinawa n'est pas encore parfaitement tranchée).

photo gnrale du site  Les vestiges jōmons ont été trouvés en association avec de la céramique Ogidō, ce qui a permis de les attribuer au Jōmon Récent. Le mobilier jōmon comporte également des éléments de parure en coquillage, du mobilier en matières dures animales (os de mammifères marins) et des épines d'oursin gravées, dont la fonction reste pour le moins obscure. Comparé aux autres sites de la même période, le mobilier lithique est limité, ce qui contraste avec l'abondant mobilier en coquillage. Il peut s'agir d'une adaptation de la culture matérielle au fait que l'habitat était situé en bord de mer, ou bien à l'absence de matières premières dans un environnement insulaire.

  

Le site comprend également un petit amas coquillier du Yayoi Récent et les restes de trois (3) individus (deux adultes et un immature) datés du Paléolithique (antérieur à 8000 – 7000 BCE, aucun mobilier n'a été trouvé en association pour confirmer cette datation).

L'amas coquillier yayoi a livré de la céramique yayoi et des concentrations d'imogai (Conidae) caractéristiques de cette période où ces coquillages étaient l'objet d'un commerce intense avec les lointaines îles de l'archipel japonais.

Le mobilier jomon






























 Mobilier jōmon. Les tessons sont de type Ogidō, la pièce de mobilier en bas à droite est en
os de mammifère marin et est décrit comme un kanzashi (pic à cheveux).
Jōmon artefacts. The sherds are from Ogidō pottery, the artefact in the down right corner is made
in sea mammal bones and is described as a kanzashi (hair ornament).
 

 

 

 

berangere: (anthropo fun)
2013-01-09 04:35 pm

Une sépulture Jomon dans le sud d'Okinawa

Carte et photos seront uploadées plus tard.

   Il est grand temps de commencer à parler un peu d'Okinawa. Malgré une activité archéologique assez importante, surtout compte tenu de la taille de l'île, la presse n'est pas terriblement prodigue en actualités. Mais ça ne peut pas faire de mal de parler de découvertes qui datent un peu, après tout, ceci est un site sur l'archéologie, nous sommes quelque part spécialisés dans les choses qui datent un peu. J'ai choisi un site avec des os jōmons*, parce que, c'est évident, tout le monde a envie de lire un article sur des os jōmons.

   Le site de Bugeidō (武芸洞遺跡, Teruda utaki baru, Maekawa-aza, Tamagusuku-ōaza**, ville de Nanjō et donc, préfecture d'Okinawa) est situé dans une grotte mesurant 25 m (Est-Ouest) par 30 m (Nord-Sud) et 4 m de haut au maximum. La grotte a deux accès, un à l'est et un à l'ouest et est située à proximité de plusieurs autres sites dont le plus célèbre est la fissure de Minatogawa dans laquelle on a retrouvé les restes d'hommes fossiles logiquement nommés "Hommes de Minatogawa" (ce sujet ne sera probablement jamais traîté sur ce site, compte tenu de l'âge des vestiges).
   Le site de Bugeidō a été l'objet de plusieurs campagnes de fouilles (toujours sur des secteurs très limités de quelques mètres carrés) entre 2007 et 2009.
   Il est (relativement) célèbre car il a été le premier site du Sud d'Okinawa dans lequel on a trouvé une unité stratigraphique contenant des tessons de vaisselle tsumegatamon, datée du Jōmon Ancien vers 4.000 BCE. Il comporte également les vestiges d'un foyer associé à de la vaisselle omonawazentei du Jōmon Moyen (2500-2000 BCE) et une sépulture avec coffrage en pierre associée à des tessons de vaisselle uzahama et nakabaru du Jōmon Final (500 BCE).

   Une centaine de tessons tsumegatamon ont été trouvés en relation avec plus de trois cents (300) fragments d'os d'animaux brûlés et divers éléments de mobilier lithique dont une hache avec le tranchant poli.

   Dans une autre zone de la grotte, les fouilles ont révélé la présence d'une sépulture avec coffrage en pierre. La sépulture tire partie du relief naturel de la grotte, qu'elle complète avec des blocs de calcaires afin de créer un coffrage complet de 240 x 115 cm. Elle était fermée grossièrement par des pierres de couverture plates et recouverte de terre.
   Le corps était déposé dans le coffrage en décubitus ventral***, la tête vers le Nord-Est, légèrement tournée vers la droite. Le squelette est parfaitement conservé malgré une notable dispersion des os des mains et des pieds. Il s'agit d'un homme d'une quarantaine d'années.
  Le mobilier funéraire (car il y en a) comporte un tridacnide (Tridacnidae) posé sur le corps à hauteur de la poitrine, un cellana mazatlandica percé d'un trou juste en dessous des cervicales et un autre près du pied gauche. Enfin, douze (12) perles qui constituaient probablement un bracelet ont été retrouvées autour de l'ulna et du radius gauche. Il s'agissait alors de la première découverte d'un bracelet de perles en place.
   Il semblerait que la sépulture ait été fermée une première fois, puis rouverte pour déposer des éléments du mobilier funéraire, ce qui expliquerait la dislocation des os des pieds et des mains, aux articulations particulièrement labiles
  À noter qu'en plus du squelette complet, la sépulture contenait aussi les restes épars et fragmentaires de deux autres. Il semble donc que le même coffrage ait été utilisé successivement pour plusieurs inhumations.

   Il existe d'autres exemples de sépultures dans des coffrages de pierres sur Okinawa : sur le site de Momenbaru (Toguchi, village de Yomitan), dans l'amas coquiller de Nakakawabaru (Tokeshi, village de Yomitan), sur le site de Ōkubobaru (Tokeshi, village de Yomitan), sur le site de Azamabaru (Mashiki, ville de Ginowan) ou sur le site de Kanikubaru (Ujidomari, ville de Ginowan). Il s'agit essentiellement de sites de bord de mer. La sépulture avec coffrage de pierres découverte à Bugeidō est la première à l'être en contexte troglodyte.

Source: 山崎真治 藤田祐樹 西秋良宏 2009 平成19・20年度南城武芸洞遺跡発掘調査の概要, 沖縄県立博物館美術館紀要 2: 5-18.

* la terminologie de la chronologie pour les périodes préhistoriques dans l'archipel des Ryūkyū sera probablement abordée plus tard sur ce site. Vraisemblablement à plusieurs reprises. Très certainement dans des articles rangés sous le tag "je râle".
** je me rends compte qu'il va également falloir un article sur les terminologies géographiques propres à Okinawa, qui n'aura peut-être pas droit au tag "je râle". Peut-être.
*** oui, ceci est un oxymore.



English translation )
berangere: (dogu)
2013-01-08 01:58 pm

Découvertes en série dans l'habitat de grande ampleur de Agarihata

Photos et cartes seront uploadées plus tard.

   Le site de Agarihata (揚り畑遺跡, ville de Toon, préfecture de Ehime) a déjà connu six (6) campagnes de fouilles depuis 1996, qui ont conduit à la découverte d'une grande quantité de vaisselle en céramique, ce qui laissait supposer l'existence d'un habitat de grande ampleur. Cette existence a été vérifiée par la septième campagne qui vient de se terminer et qui s'est étendue sur une surface de 220 x 5 m, au cours de laquelle neuf (9) habitations ont été (partiellement*) fouillées.
   Agarihata est un site du Yayoi Moyen (0-300 CE) situé à la pointe orientale de la plaine de Matsuyama.
Les découvertes remarquables de cette campagne incluent (outre "neuf habitations partiellement fouillées"…) une tête animale en céramique de 2 cm de diamètre trouvée dans un silo dans la partie ouest du village. Il s'agit de la troisième représentation animale en céramique découverte dans la préfecture pour la civilisation Yayoi. Celle-ci est la plus ancienne à ce jour.
   Dans la catégorie "statuette en céramique" on note également la présence d'une figurine anthropomorphe plate de 10 cm de haut et 6 cm de large, de forme rectangulaire. Ce type de statuettes est assez fréquent le long de la côte de la mer du Setouchi, et dans la préfecture de Ehime, on en a déjà trouvé dans les villes de Matsuyama, Saijō et Imabari.
   Enfin, l'une des habitations, au centre du village, mesure 9,5 m de diamètre et a été identifié comme un atelier (la source ne précise pas pourquoi).


*oui, 220 x 5 mètres, les chances qu'une habitation de moins de 5 mètres de diamètre tombe pile au milieu de la tranchée étaient mince, hein ?

Once more in English... )


Source )
berangere: (Default)
2013-01-08 01:14 pm

En bref : un astéroïde nommé Jomon Aomori

  Si c'est pas classe, ça...

   Un astéroïde découvert en octobre 1993 par un astronome amateur de Kitami (préfecture de Hokkaido) et jusqu'à présent appelé extrêmement banalement "14010" vient d'être rebaptisé "jomonaomori" pour soutenir l'accession des sites jomons d'Aomori *tousse*Sannai Maruyama*tousse* au rang de Patrimoine Mondial de l'Humanité.
   L'astéroïde fait 8 kilomètres de diamètre et le tour du soleil en 4,36 ans.

  English please... )

Source
berangere: (yajiri)
2013-01-08 12:51 pm

Un habitat annulaire du Jōmon Ancien à Toyama

Photos et cartes seront uploadées plus tard.

   Le site de Hiraoka (平岡遺跡, Ikeda, ville de Toyama, préfecture de Toyama) est formidable. Et je ne prétends pas ça uniquement parce que j'ai participé aux fouilles.
   Hiraoka est un site du Jōmon Ancien (4000 – 3500 BCE) situé sur la partie sud de la colline de Kureha, colline qui a déjà fait l'objet de fouilles archéologiques puisque le désormais très célèbre amas coquillier de Odake (en bref : Jōmon Ancien, 71 corps, site de l'année 2010) est situé dans sa partie nord. Le site de Hiraoka a été fouillé de juin à novembre 2012 avant des travaux pour la construction d'une route départementale. Le chantier s'étendait sur 125 m du nord au sud et 18 m d'est en ouest, soit 2250 m².
   La campagne de fouilles a permis de dégager quatorze (14) habitations semi-enterrées, environ soixante-dix structures identifiées comme des tombes et une foultitude de fosses, silos et trous de poteaux, le tout correspondant aux vestiges d'un village annulaire d'environ 100 m de diamètre. Comme quoi, je n'exagérais pas l'importance du site dans mon introduction ! Il s'agit du deuxième site de la préfecture en nombre d'habitation pour le Jōmon Ancien, le premier étant Yoshimine (吉峰遺跡, ville de Tateyama) avec vingt-deux (22) habitations.

   Il s'agit donc d'un habitat annulaire avec les tombes regroupées au centre dans une aire funéraire d'environ 65 m de diamètre, entourées par l'aire domestique comprenant les habitations. Les habitats annulaires du Jōmon Ancien sont rares dans la préfecture (disons qu'avec les sites de Yoshimine et Hikaoka, on en est maintenant à deux…) mais il en existe quelques uns pour le Jōmon Moyen comme Kitadai (北代遺跡, ville de Toyama) ou Hayatsukiuwano (早月上野遺跡, ville de Uozu), ce qui permet d'espérer quelques études comparatives sur l'évolution de ce type d'habitat dans la région dans un proche futur.
  Les tombes ne contiennent malheureusement pas d'os, mais une grande quantité de mobilier céramique et lithique. De simples fosses en pleine terre ont été identifiées comme des tombes d'adultes, alors que plusieurs vaisselles en céramique enterrées (umegame) pourraient être des tombes d'enfants.
   Les habitations mesurent environ 6 m de diamètre et comportent invariablement un silo d'environ 80 cm de profondeur. La plus grande d'entre elle atteint les 30 m², avec trois (3) silos associés et un foyer clairement identifiable au centre. Les foyers et silos ont souvent livré des restes carbonisés de fruits à écales.

   Les structures fouillées sont donc déjà grandioses, mais elles sont également accompagnées d'un mobilier incroyablement abondant ! Environ trois cents (300) caisses de tessons de céramique du Jōmon Ancien, des haches et des houes en pierre, dont certaines tellement minuscules que *même moi* j'ai pensé le mot "rituel" (pas très fort) (pas longtemps) (et en regardant ailleurs), des pierres à moudre, à concasser,des armatures de flèches magnifiques (oui, j'aime les armatures de flèches : quiconque avec deux mains gauches qui s'est jamais essayé à la taille du silex comprend instinctivement la beauté intrinsèque de ces toutes petites choses), des boucles d'oreilles innombrables et dans un état de conservation pratiquement parfait, des perles tubulaires sublimes, et des centaines d'esquilles qui prouvent un travail local de l'outillage lithique.
   La céramique est un mélange de vaisselles du type Moroiso, de l'Est du Japon, et du type Kitashirakawa, de l'Ouest du Japon, ce qui fait de Hiraoka un point de rencontre de deux cultures. Les liens du site avec l'extérieur sont également suggérés par la provenance des matières premières pour l'outillage lithique : si les boucles d'oreilles sont principalement fabriquées avec des pierres de la ville voisine de Asahi, celles utilisées pour les armatures de flèches et autres armes et outils proviennent des préfectures de Nagano et Gifu (d'accord, c'est pas comme si ils avaient traversé la moitié du Japon, mais y'avait pas de Shinkansen à l'époque. Et Toyama est entouré de montagnes du plus bel effet sur les photos et les engelures).

   Nan, en toute objectivité, ce site mérite le bérangère award du site de l'année 2012.

English Translation... )
berangere: (yoshinogari)
2012-02-17 06:04 pm

Le centre administratif de Makimuku était probablement clos par une enceinte

[Avertissement : La légère ironie qui peut transparaître dans certains des propos à suivre n'est pas une illusion]

   Neuf mois sans nouvelle du site le plus populaire de l'archéologie japonaise ! Il était temps de remédier à cette situation inacceptable !
   Makimuku, l'un des candidats au titre de capitale du royaume du Yamatai (et titulaire de la palme du "site archéologique avec le plus grand nombre d'articles lui étant consacrés" sur ce journal), continue de livrer petit à petit des indices sur son passé supposé de siège du pouvoir absolu de la reine Himiko.

   Faisons un point sur nos connaissances du site avant ces dernières découvertes. Il y a bien sûr le bâtiment de très grandes dimensions (l'un des plus grands retrouvés pour l'époque : 19,2 x 12,4 m), logiquement surnommé "le palais de Himiko". Il est parfaitement aligné avec trois autres bâtiments de taille plus modeste et cet agencement n'est pas sans rappeler celui des palais de la période Asuka (ou bien "une rangée de bâtiments", mais cette comparaison n'est pas aussi chargée de sous-entendus lourds de sens).
   Tous ces bâtiments sont en fonction lors de la première moitié du IIIè siècle CE (Yayoi Récent).
   À proximité du mur sud du grand bât du palais de Himiko, on a retrouvé les vestiges d'une première palissade, orientée est-ouest.

   La nouvelle campagne de fouilles concerne cette zone au sud du bâtiment. Entre 28 et 34 mètres au sud de la première palissade, on a retrouvé trois trous de poteaux de 20 centimètres de diamètre, espacés de 3 mètres les uns des autres, qui pourraient être les traces d'une seconde palissade, parallèle à la première.
   À 38 mètres au sud du bâtiment, juste après la seconde palissade, on a retrouvé les vestiges d'un fossé. Il a été fouillé sur une longueur de 6 mètres, est lui aussi orienté est-ouest, est large d'environ 60 centimètres pour 10 centimètres de profondeur (Oui, on a vu plus impressionnant comme fossé. D'un autre côté, qui irait s'amuser à attaquer Himiko ? C'est quand même une puissante sorcière).
   La vaisselle en céramique retrouvée à l'intérieur du fossé indique qu'il a commencé à être comblé vers le milieu du IIIè siècle CE, ce qui implique qu'il a été en fonction en même temps que le groupe de bâtiments.
   On peut noter qu'aucune construction de cette même période n'a été retrouvée dans la zone de 40 mètres qui sépare les bâtiments du fossé, il semble donc bien s'agir d'une enceinte de bâtiments très importants.


Le fossé. The ditch.
Aucun article ne parle de l'énorme structure circulaire au milieu.


English translation )


Sources )
berangere: (jomon doki)
2012-02-16 11:18 am

Vingt-trois habitations du Jomon Ancien à Shigareyama-nishi iseki

  Onze habitations avaient été découvertes en 2010 sur le site de Shigareyama-nishi, situé sur une terrasse au bord de la rivière Tate (然山西遺跡, Uchinoyama, ville de Bando, préfecture de Ibaraki). Une nouvelle campagne de fouilles est en cours depuis octobre 2011 sur une zone de 12.000 m² (entre 12 et 16 mètres d'altitude). Elle a permis de dégager vingt-trois habitations du Jōmon Ancien, deux du Kofun Récent et cinq du début de la civilisation Heian.

   Les habitations du Jōmon sont rectangulaires à ovales, de 6 par 5 mètres environ. Elles sont creusées dans le sol jusqu'à 70 centimètres de profondeur et certaines comportent plusieurs foyers. L'occupation est datée des alentours de 3.500 BCE, sur une longue durée : toutes les habitations ne sont pas contemporaines.
   Le site comporte également trois amas coquilliers distincts qui occupent l'empreinte négative laissée par certaines habitations abandonnées, plusieurs foyers extérieurs, une centaine de fosses, plusieurs fossés et une voie de circulation.

   Les coquillages qui constituent les amas coquilliers sont essentiellement des palourdes : plus de cent quarante mille spécimens de yamato shijimi (Corbicula japonaica). On trouve également des sarubō (Anadura broughtoni) et des hamaguri (Meretrix lusoria). Tous ces coquillages sont caractéristiques des zones d'estuaires : au moment du réchauffement climatique du Jōmon Ancien, la mer (située actuellement à plus de 90 kilomètres en aval du site) se trouvait à proximité immédiate de Shigareyama-nishi, et les populations jōmons exploitaient les ressources de l'estuaire de la rivière Tate.
  Des pointes de flèches, des poids de filets et des pierres à moudre retrouvés sur le site indiquent que la chasse, la pêche et la cueillette leur permettaient de compléter leur régime alimentaire.


Une habitation pleine de coquillages
A dwelling full of shells



Pierre à moudre et vaisselles en céramique
Grinding stone and ceramic vessels


   En complément du mobilier lithique, le mobilier céramique mérite d'être mentionné. Très abondant, il est essentiellement composé de bols profonds (fukabachi) et de bols peu profonds (asabachi). Les marques d'utilisation relevées sur les bols profonds indiquent qu'ils servaient à la cuisson des aliments et au stockage des denrées.
   Trois anses à décor figuratif animal (獣面把手, jūmentotte) ont été trouvées sur le site. Elles représentent des sangliers et un lapin. Ce type d'anses est assez fréquent dans l'ouest du Kantō à l'époque.


Nombreuses vaisselles en céramique en place dans l'habitation 32
Many ceramic vessels in dwelling number 32


English Translation )



Les sources )

Oui, je sais... tellement d'articles et pas une seule photo des jūmentotte...
berangere: (rizière)
2012-02-09 12:35 pm

Du riz à Ba-ga Mori Kita Shamen

  Les fouilles se poursuivent sur le site de Ba-ga Mori Kita Shamen (バーガ森北斜面遺跡, Koretomo, ville de Ino, préfecture de Kōchi), qui a reçu le prix du site avec le nom le plus bizarre de l'année dernière.
   En février dernier, perpétuellement à la pointe de l'actualité, je vous présentais le site de Ba-ga Mori Kita Shamen, l'un des plus grands établissements de hauteur de toute l'île de Shikoku.
   Le site est fouillé depuis 1957 par intermittence. Il s'étend sur 135.000 m² à flanc de montagne entre 30 et 85 mètres d'altitude. Il est occupé au Yayoi Moyen et au Yayoi Récent. Il comporte une vingtaine d'habitations, des foyers d'alerte extérieurs, une palissade et un abondant mobilier céramique, lithique et métallique (notamment martial), le tout laissant penser que le site avait à la fois une vocation stratégique défensive et un aspect domestique : il ne s'agissait pas d'un simple refuge pour les populations habitant la plaine.



   Une nouvelle campagne de fouilles a débuté en août 2011 sur une zone de 2.400 m² entre 30 et 35 mètres d'altitude.
   Elle a permis de dégager les vestiges d'un grenier de 1,8 mètre de long sur 1,2 mètre de large, dans lequel on a retrouvé une grande quantité de riz carbonisé et un tsubo (jarre à col resserré) qui contenait des glands : la présence de ces denrées permet de confirmer la fonction de stockage du bâtiment.
   Le riz est de type Oryza sativa var. japonica et on en a retrouvé environ 500 grammes (il s'agit d'une quantité importante par rapport aux découvertes habituelles).



À environ 5 mètres au nord-est de ce grenier, on a également retrouvé les vestiges d'une habitation semi-enterrée. Avec 8 mètres de diamètre, elle se trouve être la plus grande habitation découverte sur le site de Ba-ga Mori Kita Shamen à ce jour. Un foyer de 1,5 mètre de diamètre occupe son centre.
Ce bâtiment de grandes dimensions, avec des fondations imposantes et des traces d'au moins une réfection, pourrait avoir été utilisé pendant plus de cinquante ans, ajoutant du crédit à la théorie qui veut que Ba-ga Mori Kita Shamen ait été non pas un refuge temporaire mais un habitat permanent pour les populations qui cultivaient le riz dans la plaine en contrebas.



English translation and source )
berangere: (magatama)
2012-02-07 03:02 pm

Les premières perles en cristal de Shikoku

  Sept perles en cristal ont été trouvées dans une tombe hōkeishūkōbo (tombe à tumulus entourée d'un fossé quadrangulaire) sur le site de Ōtaharatakasu (太田原高州遺跡, Ōta kamimachi, ville de Takamatsu, préfecture de Kagawa). Il s'agit des premières perles en cristal retrouvées sur Shikoku pour cette période.

   Le site de Ōtaharatakasu est fouillé depuis octobre 2011 dans le cadre de travaux réalisés sur une route préfectorale. Les unités stratigraphiques supérieures ont livré des tessons de céramique Sue de la civilisation Kofun, mais la plus grande partie des vestiges sont datés de la fin du Yayoi Moyen au début du Yayoi Récent entre le Ier siècle BCE et le Ier siècle CE. Le site comporte un grand nombre de fossés qui délimitent plusieurs hōkeishūkōbo (cinq jusqu'à présent). Les fossés mesurent environ 3 mètres de large pour 1 mètre de profondeur et ils sont remplis de pierres et de vaisselles en assez bon état. Il semblerait que les pierres étaient disposées comme parement sur la face interne des fossés. Les vases, en bon état et pour la plupart avec un trou à la base, étaient probablement des offrandes funéraires.
   On ne connaît pas d'autres tombes de ce type dans la préfecture de Kagawa pour cette période : elles sont plutôt caractéristiques du Kinki et, sur Shikoku, de la préfecture de Tokushima. Elles indiquent donc de probables contacts entre ces différentes régions.




Illustrations )

   Les perles en cristal retrouvées dans une des tombes reflètent probablement elles aussi les relations entre les différentes parties de l'archipel : on connaît en effet des ateliers de fabrication de mobilier en cristal dans la région de l'ancien Tango-no-kuni (dans le nord de la préfecture de Kyōto) ou la préfecture de Tottori, sur la côte de la Mer du Japon. Les perles de cristal étaient essentiellement exportées vers la péninsule coréenne, probablement échangées contre du mobilier métallique. Il est très rare d'en retrouver sur l'archipel en dehors des régions qui comportent des ateliers. Avant cette découverte à Kagawa, on en connaissais uniquement dans les préfectures de Fukuoka et de Okayama.
   Les perles trouvées à Ōtaharatakasu mesurent 7 mm de diamètre, elles sont en forme de toupies ou bien rondes, avec un trou de 1,5 mm en leur centre. Elles sont similaires à des perles produites dans l'atelier du site de Naguoka (ville de Kyōtango, préfecture de Kyōto). Ce site est situé à 180 km à vol d'oiseau, de l'autre côté de la Mer du Setouchi. Si les perles proviennent effectivement de cet atelier, cela fournira des indications précieuses sur les réseaux commerciaux dans l'archipel au yayoi Moyen.



   À noter que deux perles tubulaires en pierre verte ont également été retrouvées dans une autre tombe.



berangere: (yoshinogari)
2012-02-06 01:26 pm

Le plus grand village Yayoi du nord de Oita

  Une zone de 12.000 m² a été fouillée depuis juin dernier à Nakatsu dans le cadre du programme de sauvetage avant les travaux de construction de l'autoroute de l'est de Kyūshū.
   Le site, baptisé Isayama (諌山遺跡, Sankō Isayama, ville de Nakatsu, préfecture de Ōita) a livré des vestiges de la civilisation Heian (une certaine quantité de porcelaine chinoise qui laisse supposer la proximité immédiate d'un organe administratif important du gouvernement) et le plus grand habitat yayoi du nord de la préfecture découvert à ce jour.

   Isayama, occupé de la fin du Yayoi Ancien au Yayoi Récent (IVè siècle BCE - IIè siècle CE), compte en effet plus de cent habitations semi-enterrées, une vingtaine de silos, une vingtaine de fosses-dépotoirs à céramique, cinq fosses-pièges pour la chasse, plusieurs bâtiments à plancher surélevé et un fossé qui entoure probablement l'habitat.
   On remarque également de mystérieux alignements de trous de poteaux dont on ne connaît actuellement aucun équivalent. Ces alignements s'étendent environ sur 200 mètres en quatre endroits du site, les trous de poteaux sont assez désordonnés. Contre toute attente, cette structure unique et énigmatique n'a pas été interprétée comme rituelle, mais comme un élément d'un probable système de défense.

   Le mobilier comporte son lot de tessons yayois (600 caisses, avis aux amateurs de remontage...), des couteaux à moissonner en pierre, un miroir en bronze de facture locale et une épée en pierre.
   La vaisselle est souvent décorée de motifs ōsenmon (凹線文, des lignes concaves), très populaires dans la région du Setouchi, ce qui laisse supposer des échanges culturels entre cette zone et le nord de Kyūshū à l'époque.

   Il reste encore 12.000 m² à fouiller dans cette zone avant le début des travaux de construction. L'équipe de recherche du Centre pour les Propriétés Culturelles Enterrées du Comité d'Éducation de la Préfecture de Ōita espère faire la lumière sur la structure sociale du groupe humain qui occupait ce village, ainsi que sur les liens qui existaient entre le nord de Kyūshū, le Chūgoku et Shikoku au Yayoi.




berangere: (itazuke)
2012-02-04 01:33 pm

Représentations animales sur une vaisselle du Yayoi Moyen

  En remontant les tessons d'une vaisselle trouvée en 2010 dans une tombe hōkeishūkōbo (tombe à enceinte quadrangulaire) du Yayoi Moyen (100 BCE) sur le site de Kitakaname Tsukagoshi (北金目塚越遺跡, groupement de sites de Sanada Kitakaname, ville de Hiratsuka, préfecture de Kanagawa), les archéologues de la ville de Hiratsuka ont remarqué une frise de cerfs sur le col du tsubo (un tsubo est une jarre à col resserré).

   Le fragment remonté fait 15,5 cm de haut. La frise compte quatre animaux tournés vers la gauche, dessinés à la spatule. Ils ont un long cou, une petite tête triangulaire surmontée de deux bois.
   Les cerfs sont plutôt caractéristiques des décors de l'ouest du Japon au Yayoi : ils y sont nombreux sur les poteries et lesdōtakus (cloches en bronze), mais on connaît déjà cinq autres exemples de représentations de cerfs sur des poteries dans la préfecture de Kanagawa, ce qui laisse supposer une influence des régions de l'ouest jusque dans cette préfecture (ou une homoplasie, si tant est que l'on puisse utiliser le terme pour des motifs décoratifs).



English Translation, d'autres images et la source... )
berangere: (kame)
2012-01-03 01:46 pm

Mizuwake, une teinturerie yayoi

  Bonne année 2012 ! Je vais tenter de rattraper le retard accumulé en fin d'année dernière... (et comme j'aime me compliquer la tâche, je bêta-teste le nouvel éditeur de texte de Dreamwidth dans lequel il faut écrire tout l'html soi-même... yeah)

   À la fin du mois de novembre dernier, la ville de Kurume a annoncé la découverte de dix-sept habitations et d'un fossé double du Yayoi Récent (IIè - IIIè siècle CE) sur le site de Mizuwake (水分遺跡, préfecture de Fukuoka, ville de Kurume, quartier de Tanushimaru).
   L'habitat à enceinte de Mizuwake est fouillé depuis novembre 2010 avant la construction d'une bretelle d'autoroute et la dernière campagne a couvert une surface de 3.000 m².

  Le fossé circulaire double est daté de la deuxième moitié du Yayoi Récent et du Yayoi Final. Il mesure 2,6 m de large et 60 cm de profondeur.
   La découverte majeure de cette campagne de fouilles concerne la présence de nombreuses traces de pigments rouges dans les habitations : on a retrouvé de l'ocre et du cinabre dans neuf des dix-sept habitations.
   L'ocre est relativement commun sur les sites préhistoriques japonais (et aussi sur les sites préhistoriques ailleurs dans le monde : l'ocre est super tendance à la Préhistoire) mais le cinabre est essentiellement réservée à la décoration d'objets de prestige et il est rare d'en trouver de telles quantités sur un même site.

   Dans une habitation, le pigment a été retrouvé dans deux coupelles qui sont en fait deux parties d'un pot kame qui a été coupé dans le sens vertical. Le pot original mesurait 39 cm de haut et 26 cm de large. Les cas de réutilisation de pots brisés ou de modification de pots après cuisson pour en changer la fonction sont plutôt rares.






   L'habitation mesure 5,8m de long pour 5m de large, elle est creusée dans le sol sur une profondeur de 60 cm. Un foyer, entouré d'une grande quantité de pots en céramique, occupe son centre. On a retrouvé dans cette habitation une perle magatama en verre, 238 perles rondes en verre, des pointes de flèche en fer, en cuivre et en os.

   Il existe de nombreux sites à intervalles réguliers le long de la rivière Chikugo, mais ce village semble être un habitat plus important : il est entouré d'un fossé double et pourrait être au centre d'un réseau commercial important pour obtenir et distribuer les pigments. Il abrite vraisemblablement un groupe d'artisans spécialisés dans l'utilisation des pigments.
   Il est également intéressant de noter la présence de flèches en cuivre et en os à une époque ou l'industrie du fer est pourtant enfin pleinement développée sur l'archipel : il semble que les ressources en fer soient insuffisantes pour répondre à la demande en flèches, probablement liée à l'essor des conflits armés.

Source )